Prévention

LA PRÉVENTION SECONDAIRE :  REPÉRER ET DIAGNOSTIQUER PRÉCOCEMENT

Une prise en charge adaptée et précoce améliore considérablement le pronostic ainsi que la qualité de vie des patients souffrant de troubles psychiatriques. C'est surtout entre 15 et 25 ans que débutent les troubles psychiatriques de l’adulte, et avec souvent, le développement de symptômes avant-coureurs dits prodromiques.

La Détection et l’Intervention Précoces dans les Pathologies Psychiatriques Émergentes du jeune adulte et de l’Adolescent est une approche clinique qui s'intéressent particulièrement aux premières phases de la maladie lors de l'apparition des premiers symptômes. L’enjeu du diagnostic et d’une prise en charge précoces, est important lorsque l’on sait que les cinq premières années de la maladie constituent une phase critique au cours de laquelle les réponses aux traitements sont les meilleures et les chances de rémission les plus grandes.

Cette approche fait partie d'un nouveau paradigme de prévention secondaire et conduit à la réforme des services de santé mentale dans de nombreux pays.

En France, l'offre du secteur, si elle constitue toujours un échelon indispensable de proximité et de recours, ne permet pas aujourd'hui de répondre seule aux enjeux complexes de la prise en compte de l’ensemble des troubles psychiatriques. Les orientations nationales récentes dans le domaine de la santé mentale préconisent le développement de l'intervention précoce (Rapport Laforcade 2016) mais ce type d'intervention ne fais pas encore partie des standards de prise en charge.

Le modèle de l'Intervention Précoce repose sur quatre phases :

  1. La promotion d'un environnement favorable : renforcer les ressources collectives et individuelles afin de favoriser la gestion des problématiques sociales à l'intérieur de la communauté. L'objectif principal étant d'éviter l'exclusion et la marginalisation.
  2. Le repérage : accorder de l'importance aux différentes situations qui provoquent de l'inquiétude, se questionner face à une éventuelle vulnérabilité et repérer les signaux alertant.
  3. L'évaluation : posture de questionnement, de la part des professionnels, permettant d'évaluer les vulnérabilités relevées dans la phase précédente.
  4. La prise en charge : diminuer les facteurs de risque ou renforcer les facteurs de protection chez les jeunes présentant de réelles vulnérabilités. L'objectif principale est de proposer une prise en charge axée sur l'autonomie en offrant des outils permettant aux jeunes de faire face.

Les conditions qui prédisposent aux troubles mentaux sont assez bien connues et permettent d’identifier des catégories de jeunes auprès desquelles toute l’attention doit être portée. Ces prises en charge particulières concernent les jeunes âgés de 15 à 25 ans confrontés par exemple à l’échec ou difficultés scolaires, à des conduites addictives ou à risque, à des situations familiales pathogènes, à la maltraitance, aux carences affectives et éducatives, qui présentent une souffrance psychique identifiée, ou dont les ascendants présentent des troubles mentaux (exemple des enfants de parents souffrant de schizophrénie ou de troubles bipolaires).

SITUATIONS PARTICULIÈRES : Liens entre pathologies psychiatriques émergentes et addictions :

L'adolescence est une période de profonde réorganisation neuroanatomique et fonctionnelle du cerveau, qui correspond à d'importants changements de maturation comportementale et cognitive. Au cours de cette période de développement, le cerveau est vulnérable face aux effets des agressions de l'environnement dont l’effet des substances psychoactives.

Si la grande majorité des jeunes s’initie à la consommation de produits, elle le fait le plus souvent sans lendemain. Ces consommations pouvant avoir des conséquences dangereuses non négligeables, restent le plus souvent occasionnelles, circonscrites à une période, comme une parenthèse dans le parcours du jeune.

Il existe toutefois un lien entre presque tous les types d'abus de substances et les troubles mentaux. Les personnes atteintes de schizophrénie, par exemple,  présentent des taux élevés d’addictions surtout le tabac, l'alcool et le cannabis. Cela est particulièrement vrai au sein de cohortes de jeunes suivis pour un premier épisode psychotique avec des taux de prévalence d’abus de substances allant de 22% à plus de 50%.

Les enfants exposés in utero au cannabis présentent des déficiences neurocomportementales et cognitives permanentes. La consommation répétée de cannabis pendant l'adolescence risque d’entraîner des changements durables au niveau cérébral, pouvant compromettre le fonctionnement scolaire, professionnel et social et doubler les risques de décrochage scolaire précoce et de troubles cognitifs.

Un abus de substances augmente le risque global de développer une schizophrénie. L’usage de substances se produit avant la phase prodromique dans 28 à 34% des cas. Les substances les plus couramment utilisées chez ces jeunes sont le cannabis, l'alcool et le tabac, mais le plus grand risque de développer une schizophrénie a été trouvé chez les consommateurs de cannabis. Le tabagisme intense à l'adolescence serait aussi un facteur de risque de psychose. Il existe une corrélation entre l'âge de début du tabagisme et l’apparition de troubles psychotiques chez les jeunes adultes avec un effet dose-dépendant. Les adolescents qui fument plus de 10 cigarettes par jour à 15-16 ans, sont, comparativement aux non-fumeurs, environ trois fois plus susceptibles de développer un trouble psychotique à l'âge de 30 ans.

L'abus d'hallucinogènes, les sédatifs et d'autres substances augmentent également le risque de manière significative.

Des stratégies d'intervention pour aider les jeunes à haut risque de transition psychotique devraient être mises en œuvre, et des campagnes d'éducation du public devraient viser à accroître la sensibilisation aux risques pour la santé liés aux substances. Les symptômes psychotiques de courte durée après consommation de cannabis ou qui ne nécessitent pas de traitement devraient faire l'objet de suivis prospectifs.