Centre d’Expertise Psychosomatique et Neuropsychologique du Syndrome Post-COVID à la Clinique des Portes de l’Eure

  1. La pandémie du COVID-19 est dans sa deuxième année.
    Elle a causé plus de 140 millions de cas et plus de 3 millions de décès à ce jour. De nouveaux variants à propagation rapide sont apparus avec une augmentation des infections dans de nombreux pays et de nouveaux confinements. Des millions de morts, des conflits économiques et des limitations sans précédent sur les interactions sociales entrainant des effets marqués sur la santé mentale. La crainte est que la détérioration de la santé mentale ne persiste longtemps après la fin de pandémie.

  2. Les atteintes neuropsychiatriques en lien avec le Covid-19
    Les symptômes respiratoires et gastro-intestinaux sont accompagnés de symptômes neuropsychiatriques (NP) à court et à long terme et de séquelles cérébrales à long terme.

    Certains patients présentent une anosmie, des déficits cognitifs et d'attention (c.-à-d. Un brouillard cérébral), une anxiété d'apparition nouvelle, une dépression, une psychose, des convulsions et même un comportement suicidaire. Ceux-ci se présentent avant, pendant et après les symptômes respiratoires et ne sont pas liés à une insuffisance respiratoire, suggérant des lésions cérébrales indépendantes.

    L'inflammation serait à l’origine d’une anhédonie, des symptômes cognitifs, psychomoteurs et neurovégétatifs négatifs, une dépression et un comportement suicidaire, qui répondent mal aux antidépresseurs conventionnels. Chez les personnes qui tentent de se suicider et souffrent d'un trouble dépressif majeur, des études ont révélé une kynurénine (métabolite du tryptophane) plasmatique élevée, des taux élevés d'IL-1 et d'IL-6 dans le sang, le liquide céphalo-rachidien et le cerveau, et une augmentation de la protéine C-réactive sérique en corrélation avec les taux de glutamate cérébral. Il est donc important d’atténuer les séquelles cognitives, émotionnelles et comportementales post-COVID-19 à long terme pour réduire la charge de la maladie. 1

  3. Principales répercussions psychiatriques
    Plus d'un tiers des patients atteints de COVID-19 développent des symptômes NP : maux de tête, paresthésies, troubles de la conscience. Ces symptômes semblent être associés à des infections COVID-19 plus sévères. 2

    Dans une cohorte de 40 469 patients COVID-19 évalués au sein d’une Plateforme mondiale de recherche clinique, 22,5 % présentait des manifestations neuropsychiatriques : maux de tête (3,7%) et des troubles du sommeil (3,4%), anxiété et troubles apparentés (4,6%), troubles de l'humeur (3,8 %), idées suicidaires (0,2 %). 3

    La reconnaissance précoce et la prise en charge rapide des manifestations neuropsychiatriques chez ces patients ont le potentiel de réduire la morbidité et la mortalité globales.

  4. COVID long
    Une deuxième pandémie a émergé, c'est-à-dire des personnes souffrant de symptômes après une infection au SRAS-CoV-2. La littérature récente suggère en effet l'émergence d'un nouveau syndrome connu sous le nom de « COVID long », un terme utilisé pour décrire un ensemble diversifié de symptômes qui persistent au moins 4 semaines après le début d'une infection diagnostiquée au COVID-19.

    Cependant, le terme « COVID long » a été utilisé de plusieurs manières dans la littérature. D'autres termes ont également été utilisés. Greenhalgh et al. (2020) 4 utilise les termes « COVID-19 post-aigu » (de 3 à 12 semaines) et « COVID-19 chronique » pour les symptômes s'étendant au-delà de 12 semaines. L'examen thématique du National Institute for Health Research note la possibilité d'un certain nombre de syndromes différents.

    Le syndrome COVID long ou post-COVID-19 a d'abord été largement reconnu parmi les groupes de soutien social et plus tard dans les communautés scientifiques et médicales. Cette maladie est mal comprise car elle affecte les survivants du COVID-19 à tous les niveaux de sévérité de l’infection, même les jeunes adultes, les enfants et ceux qui ne sont pas hospitalisés. Bien que la définition précise du COVID long puisse faire défaut, les symptômes les plus courants rapportés dans de nombreuses études sont la fatigue et la dyspnée qui durent des mois après le COVID-19 aigu.

    D'autres symptômes persistants peuvent inclure des troubles cognitifs et mentaux, des douleurs thoraciques et articulaires, des palpitations, des myalgies, des troubles de l'odorat et du goût, de la toux, des maux de tête et des problèmes gastro-intestinaux et cardiaques. À l'heure actuelle, il existe une littérature limitée sur la pathophysiologie possible, les facteurs de risque et les traitements dans le COVID long. En bref, un COVID long peut être provoqué par des lésions tissulaires à long terme (par exemple poumon, cerveau et cœur) et une inflammation pathologique (par exemple par persistance virale, dérégulation immunitaire et auto-immunité).

    Les facteurs de risque associés peuvent inclure le sexe féminin, plus de cinq symptômes précoces, une dyspnée précoce,
    des troubles psychiatriques antérieurs et des biomarqueurs spécifiques (par exemple le D-dimère, la CRP et le nombre de lymphocytes). Mais des recherches supplémentaires sont nécessaires pour justifier ces facteurs de risque. Alors que les preuves préliminaires suggèrent qu'une activité de rééducation personnalisée peut aider certains cas de COVID longs, les médicaments réutilisés à partir d'autres conditions similaires, telles que l'encéphalomyélite myalgique ou le syndrome de fatigue chronique, le syndrome de tachycardie orthostatique posturale et le syndrome d'activation des mastocytes, auraient également un potentiel.



     



    Un aperçu des symptômes, de la physiopathologie probable, des facteurs de risque associés et des traitements potentiels impliqués dans le long COVID.

    Les lignes pointillées représentent les zones où les preuves manquent relativement par rapport aux lignes non pointillées. (Couleur en ligne uniquement)

    La Haute Autorité de santé (HAS) a reconnu en février dernier l'existence d'une affection longue chez certaines personnes ayant été testées positives au Covid-19.  Elle précise que 3 critères permettent de repérer les patients souffrant de symptômes prolongés du COVID-19 : 

    - Ils ont présenté une forme symptomatique de COVID-19 ;
    - Ils présentent un ou plusieurs symptômes initiaux 4 semaines après le début de la maladie ;
    - Aucun de ces symptômes ne peut être expliqué par un autre diagnostic.

    Plus de la moitié de ces patients présentent encore au moins un des symptômes initiaux 1 mois après le début de la maladie et plus de 10 % après 6 mois, la gravité et le temps de récupération variant en fonction des patients.

    Le NICE (National Institute for Health and Care Excellence), le Scottish Intercollegiate Guidelines Network (SIGN) et le Royal College of General Practitioners (RCGP), donnent les définitions cliniques suivantes pour la maladie initiale et le long COVID selon le moment de l’évolution :

    - COVID-19 aigu : signes et symptômes de COVID-19 jusqu'à 4 semaines.
    - COVID-19 symptomatique en cours : signes et symptômes de COVID-19 qui persistent après 4 à 12 semaines.
    - Syndrome post-COVID-19 : signes et symptômes qui se développent pendant ou après une infection compatible avec COVID-19, qui persistent pendant plus de 12 semaines et ne sont pas expliqués par un diagnostic alternatif. Le terme de « COVID Long » comprend à la fois le COVID-19 symptomatique en cours (de 4 à 12 semaines) et le syndrome post-COVID-19 (12 semaines ou plus).

    Pour le NICE, cette maladie nouvelle et émergente décrite sous le terme de « COVID long », peut avoir un effet significatif sur la qualité de vie des personnes. Cela présente également de nombreux défis lorsqu'il s'agit de déterminer les normes de soins en fonction des données probantes actuelles. Il n'y a pas de définition clinique ou de modalités claires de traitement.

    Le NICE recommande une consultation initiale pour les personnes préoccupées par des symptômes nouveaux ou persistants 4 semaines ou plus après une COVID-19 aiguë. Il serait utile d’envisagez l’utilisation d’un questionnaire de dépistage dans le cadre de la consultation initiale, après une évaluation clinique, pour aider à saisir tous les symptômes du patient.

    Les résultats des études démontrent que ceux qui surmontent le COVID-19 peuvent présenter des symptômes persistants après s'être rétablis de leur maladie initiale, en particulier chez les personnes précédemment hospitalisées. Des suivis menés en Allemagne et au Royaume-Uni ont trouvé des symptômes neuropsychiatriques post-COVID-19 chez 20% à 70% des patients, même chez les jeunes adultes, et durant des mois après la résolution des symptômes respiratoires, suggérant que l'atteinte cérébrale persiste. La majorité des symptômes signalés étaient la fatigue, l'essoufflement, la toux et les troubles du sommeil. Des troubles mentaux, tels que la dépression et les troubles anxieux, ont également été signalés.

    Comme des millions de personnes ont été infectées et que d'autres continueront de l'être, le nombre de ces patients augmente considérablement avec une pléthore de symptômes post-COVID affectant différents systèmes: neurocognitif (brouillard cérébral, étourdissements, perte d'attention, confusion), système nerveux autonome (douleur thoracique, tachycardie, palpitations), gastro-intestinal (diarrhée, douleurs abdominales, vomissements), respiratoire post-COVID (fatigue générale, dyspnée, toux, mal de gorge), musculosquelettique (myalgies, arthralgies), psychologiques (trouble de stress post-traumatique, anxiété, dépression, insomnie) et autres manifestations (agueusie, anosmie, parosmie, éruptions cutanées). En fait, la plupart des études publiées à ce jour sur les symptômes post-COVID ont montré que 50 à 70% des patients hospitalisés présentent plusieurs symptômes post-COVID jusqu'à 3 mois après la sortie de l'hôpital.

    La première étude est venue de Chine avec une cohorte de 1733 patients adultes. Après leur hospitalisation, trois patients sur quatre avaient des symptômes durables. Six mois après le début de la maladie, 76% souffrent encore d’au moins un symptôme : fatigue ou faiblesse musculaire (63%), troubles du sommeil (26 %), un sur quatre (23 %) disait être anxieux ou souffrir de dépression durant cette période. 50% présentait anomalies résiduelles de l'imagerie thoracique. La sévérité de la maladie pendant la phase aiguë était indépendamment associée à ces manifestations. Les conditions cardiométaboliques, y compris le diabète sucré de type 1 et de type 2, sont associées à un COVID-19 sévère et à un COVID long. 5

    Sur 402 patients italiens, un mois après leur sortie de l'hôpital, 56 % s'étaient vus diagnostiquer au moins un problème psychiatrique notamment la dépression, l'anxiété ou encore des troubles du stress post-traumatique.

    Concernant encore la santé mentale, dans une étude de cohorte de 62 354 COVID-19 aux USA, il est noté que dans les 3 mois après un test positif, 1 survivant sur 5 présentait une affection psychiatrique. Chez tous les malades confondus, avec ou sans antécédent psychiatriques, l’incidence des diagnostics psychiatriques après la COVID-19 était de 18,1 %. 6 La probabilité globale estimée de diagnostic d'une nouvelle maladie psychiatrique dans les 90 jours après le diagnostic de COVID-19 était de 5,8% (trouble anxieux= 4,7% ; trouble de l'humeur = 2% ; insomnie = 1,9 % ; démence (parmi ceux ≥65 ans) = 1,6%).

    Dans une étude rétrospective d’une autre cohorte de 236 379 patients diagnostiqués avec COVID-19, une personne sur trois qui a surmonté le Covid-19 a eu un diagnostic de troubles neurologiques ou psychiatriques dans les six mois suivant l’infection. L’anxiété (17 %) et les troubles de l’humeur (14 %) étaient les diagnostics les plus fréquents. 7

    Dans une cohorte de 47 780 patients hospitalisés pour COVID-19, près d'un tiers d’entre eux ont été réadmis sur un suivi moyen de 140 jours après leur sortie. 8
    Sur le suivi de 4 182 cas de COVID-19, les personnes qui présentaient plus de cinq symptômes pendant la première semaine de la maladie avaient plus de risques de développer un COVID long. 9

    Dans une enquête menée en France auprès de 1137 patients ayant développé une forme clinique de la maladie qui nécessitait une hospitalisation, il était noté que 60 % des patients sont toujours affectés par au moins un symptôme six mois après infection et un quart d’entre eux par trois symptômes ou plus. Parmi les symptômes persistants les plus fréquemment rapportés lors des visites de suivi 3 à 6 mois après leur hospitalisation : une sensation importante de fatigue, des gênes respiratoires et des douleurs musculaires et articulaires. L'étude montre par ailleurs que parmi les patients qui rapportent des symptômes à 6 mois et qui exerçaient une activité professionnelle lorsqu’ils ont été infectés, un tiers n’est pas retourné travailler. 10

    Il existe peu de relation entre la gravité de la maladie aiguë et la probabilité de développer un Long-COVID. Le Long-COVID peut ne pas être directement attribuable à l'effet du SRAS-CoV-2. Il correspondrait aussi aux effets biopsychosociaux du COVID-19.

    Les données des patients COVID-19 non hospitalisés sont rares et révèlent que 50 à 75 % sont sans symptômes un mois après l'apparition des symptômes. On s'attend à ce que les symptômes post-COVID soient différents entre les patients hospitalisés et non hospitalisés, mais cette hypothèse doit être confirmée dans les études futures.

    Une étude italienne basée sur une enquête en ligne, a collecté des données démographiques, des informations liées au COVID-19, des troubles du sommeil et des données sur la qualité de vie de 507 personnes. Les principaux symptômes associés au « long COVID » étaient les maux de tête, la fatigue, les douleurs musculaires/myalgies, les douleurs articulaires, les troubles cognitifs, la perte de concentration et la perte de l'odorat. De plus, les sujets présentaient des niveaux significatifs d'insomnie et une qualité de vie globalement réduite. 11

    500.000 cas potentiels en France : Le COVID long touche entre 10 à 30% des malades, selon les études en France. Leur test PCR est négatif et ces malades ne sont plus contagieux. Les premières études en population" suggèrent qu'il y aurait "jusqu'à un tiers des patients qui ont présenté une forme symptomatique du Covid, et pas nécessairement une forme grave justifiant une hospitalisation, qui conserverait à distance de plusieurs semaines, parfois plusieurs mois après cette maladie, des symptômes qui peuvent être invalidants", a déclaré Olivier Véran. Cela représente "plus de 500.000 cas potentiels en France aujourd'hui, qui peuvent trouver une réponse territorialisée auprès de leurs médecins généralistes et des maisons de santé pluridisciplinaires [MSP]", a-t-il assuré. (Samedi 20 février 2021)

    (https://www.apmnews.com/depeche/1/363818/alpes-maritimes-des-vacci)

    Prévisions pour l'Allemagne (Juin 2021) - La ministre fédérale de la Recherche, Anja Karliczek, suppose qu'environ 350 000 personnes en Allemagne souffrent des effets à long terme du COVID-19. Cela ressort des données d'études internationales, selon lesquelles environ un survivant sur dix est aux prises avec un "Long Covid". Parmi les effets possibles à long terme, on compte environ 50 symptômes différents, comme des maux de tête récurrents, un épuisement extrême ou des difficultés de concentration. Le ministre a prévenu que Long Covid aurait des "conséquences énormes" pour le secteur de la santé. "Nous sommes confrontés à un grand défi de société", a-t-elle déclaré. Son département met désormais cinq millions d'euros à disposition pour la recherche sur le syndrome post-COVID-19.  12

  5. Les causes du COVID Long
    Les hypothèses sont nombreuses. Certaines restent assez classiques : tissus endommagés durablement, inflammation chronique, persistance du virus dans les tissus sous une forme latente et résurgence sporadique selon l’état de santé de la personne, comme avec les virus de l’herpès en cas de grippe ou de fatigue… Les autres causes sont encore débattues et sources de nombreux travaux : dysfonctionnement des mitochondries, le stress cellulaire, dysfonctionnement du tronc cérébral.

  6. L’état de stress post-traumatique
    Autre complication liée à la pandémie.

    Les pandémies sont devenues plus fréquentes et plus complexes au cours du XXIe siècle. L’état de stress post-traumatique (PTSD) après une pandémie est un problème de santé publique important. Une méta-analyse a tenté de fournir une estimation de la prévalence mondiale du PTSD après des pandémies à grande échelle ainsi que des facteurs de risque associés (SRAS, H1N1, poliomyélite, Ebola, Zika, Nipah, MERS-CoV, H5N1 et COVID-19). La prévalence globale moyenne du PTSD post-pandémique dans toutes les populations était de 22,6%. Les travailleurs de la santé avaient la prévalence la plus élevée (26,9%), suivis des cas infectés (23,8%) et du grand public (19,3%). Un suivi à long terme et des interventions précoces doivent être mis en œuvre pour améliorer la santé mentale post-pandémique et le rétablissement à long terme. 13

    Les facteurs prédisposant à un risque plus élevé de PTSD post-pandémique
    Facteurs personnels, familiaux ou sociétaux : Sexe féminin, faible revenu annuel, faible niveau d'éducation, tout trouble ou antécédent psychiatrique, faible niveau de soutien familial / social, la quarantaine ou l'expérience de l'isolement social, pertes économiques, impact sur les moyens de subsistance, être suspecté ou confirmé d'être infecté, des parents, amis hospitalisés ou décédés des suites de l'infection, les infirmières, médecins généralistes.

  7. Prise en charge
    Il est de plus en plus clair que les soins aux patients atteints de COVID-19 ne se terminent pas au moment de la sortie de l'hôpital, et une coopération interdisciplinaire est nécessaire pour une prise en charge globale de ces patients en ambulatoire. En tant que tel, il est crucial que les systèmes de santé et les hôpitaux reconnaissent la nécessité d'établir des cliniques COVID-19 dédiées, où des spécialistes de plusieurs disciplines sont en mesure de fournir des soins intégrés. 14



    Prise en charge interdisciplinaire. La collaboration multidisciplinaire est essentielle pour fournir des soins ambulatoires intégrés aux survivants de COVID-19 aigu. (Nalbandian, A., Sehgal, K., Gupta, A. et al. Post-acute COVID-19 syndrome. Nat Med 27, 601–615 (2021). https://doi.org/10.1038/s41591-021-01283-z)
    Le NICE recommande une évaluation psychiatrique pour les personnes ayant des symptômes persistants de COVID-19 ou un syndrome post-COVID-19 si elles présentent des symptômes psychiatriques graves ou sont à risque d'automutilation ou de suicide. Il recommande également une psychothérapie en cas de symptômes anxieux légers ou de dépression légère. L’orientation vers un service de psychiatrie dans les cas plus complexes.

    Une résolution a été votée à l'unanimité par l'Assemblée Nationale le 17 février. Les députés invitent le gouvernement à "proposer un parcours de soins adapté (...) aux personnes souffrant de complications persistantes" du COVID-19 et de "faciliter la reconnaissance en tant que maladie professionnelle".

    Pour faciliter la prise en charge de ces patients, l’HAS a notamment édité dix fiches pratiques dans lesquelles elle détaille les moyens à mettre en œuvre pour tenter de remédier aux principaux symptômes et de soulager les malades : fatigue, douleurs thoraciques ou encore hyperventilation font notamment partie des affections détaillées. La HAS invite également "les médecins à faire preuve d'écoute et d'empathie envers les patients souffrant de symptômes prolongés, et à les rassurer quant aux possibilités de prise en charge et au caractère temporaire et réversible de leur situation".

    Concernant les Troubles somatiques fonctionnels prolongés, l’HAS recommande : « Ces symptômes sont souvent multiples et polymorphes de différents ordres : cardiopulmonaire (palpitations, oppressions, essoufflement sans effort, …), gastro-intestinaux (nausées, ballonnements, brûlures épigastriques …), musculosquelettique (douleurs articulaires, musculaires, sensation de faiblesse motrice, d’engourdissement …) ou général (troubles de la concentration, difficultés de mémorisation, fatigue excessive …). »

    La Haute Autorité de Santé conseille de nommer et d’expliquer le trouble, sans le stigmatiser. Les mécanismes de ces troubles sont mal connus et peuvent être augmentés avec l’anxiété.

    - Il faut éviter la pérennisation de ces symptômes par certains comportements comme le repos prolongé.
    - La reprise de l’activité par Tai Chi, Quigong, yoga, marche nordique, natation, vélo peut être proposée dans un premier temps.
    - Un réentrainement à l’effort avec un kinésithérapeute peut être nécessaire avec une thérapie cognitivo-comportementale.
    - Les traitements médicamenteux, en revanche, sont déconseillés.

    La consultation médicale doit à la fois comprendre une évaluation de l'état de santé actuel des patients pour notamment identifier les facteurs déclenchant la survenue des symptômes et évaluer leur impact sur la qualité de vie, ainsi qu'une évaluation de l'épisode initial. Les médecins doivent s'assurer que ces symptômes ne sont pas en rapport avec des complications de l'infection passées inaperçues par exemple.

    Les professionnels de santé doivent proposer un projet de soins personnalisé, assorti d'objectifs réalisables et d'un suivi dont ils auront discuté avec le patient (son entourage ou ses soignants si nécessaire). Outre des traitements symptomatiques adaptés, la rééducation est un aspect important dans la prise en charge.

    La HAS invite les médecins à faire preuve d'écoute et d'empathie envers les patients souffrant de symptômes prolongés, et à les rassurer quant aux possibilités de prise en charge et au caractère temporaire et réversible de leur situation.

    La HAS propose une douzaine de réponses rapides. Parmi les principales recommandations :
    - La majorité des patients peut être suivie en soins primaires dans le cadre d’une prise en charge holistique.
    - L’exploration de troubles anxieux et dépressifs, de troubles fonctionnels et la proposition d'un soutien psychologique sont à envisager à toutes les étapes du suivi.
    - Un recours doit être possible dans des organisations pluridisciplinaires et pluriprofessionnelles, au niveau territorial.  Certains patients devraient pouvoir accéder à des services multidisciplinaires de rééducation, de réadaptation et de soutien.

  8. Création d’un Centre d’Expertise Psychosomatique et Neuropsychologique du Syndrome Post-COVID au sein de la Clinique des portes de l’Eure.
    L’idée principale du projet est d’offrir la possibilité d’une évaluation psychiatrique et neuropsychologique et de suivi au sein de la CPE, pour les patients souffrant d’un syndrome post-COVID dans ses expressions psychosomatiques, psychologiques, psychiatriques et neurocognitifs.

    Les patients souffrent fréquemment de troubles physiques, tels que douleurs dans différentes parties du corps, fatigue, ou troubles des fonctions cardiovasculaires, gastro-intestinales ou autres organes. Ils peuvent se manifester sous forme de palpitations, vertiges, diarrhée, faiblesse des membres, etc. De nombreux patients se plaignent de plusieurs symptômes simultanément, mais certains ne souffrent que d’un symptôme persistant. La souffrance ne se limite pas à l'expérience des plaintes corporelles ; elle comporte également des aspects psychologiques et comportementaux tels qu'une anxiété importante. Chez la plupart des patients, la souffrance est dominée par un sentiment de détresse, mais chez certains, l'anxiété est au cœur de leur souffrance et les symptômes somatiques sont négligeables.

    Même si dans le Syndrome post-COVID les mécanismes en jeu ne sont tous élucidés, il peut correspondre au trouble à symptomatologie somatique et troubles apparentés (DSM5) ou des troubles de détresse corporelle (onzième révision de la CIM [CIM-11 ]). Ces troubles ont une caractéristique commune : la prééminence de symptômes somatiques associés à une détresse et un handicap significatif.

    La complexité de l’expression symptomatique dans le Syndrome post-COVID et la grande variabilité clinique nécessite une approche psychosomatique qui s’inscrit dans le cadre d’une psychiatrie de liaison sous la forme d’une médecine holistique en proposant de traiter la personne dans sa globalité. Cette approche se caractérise par une démarche intégrative faisant intervenir, de manière coordonnée et associée, des soins, aussi sur le plan somatique, que psychologique, émotionnel et social. Elle nécessite par conséquent un travail pluridisciplinaire et de concertation étroite entre tous les intervenants. En médecine psychosomatique, telle que définie, les approches thérapeutiques intègrent une grande diversité de techniques : réhabilitation psycho-sociale, TCC, thérapie cognitive basée sur la pleine conscience, psychothérapies individuelles et de groupe, thérapies à médiation corporelle, soins somatiques.

    Cette démarche psychosomatique met en lumière des dérèglements associés aux pathologies et offre des pistes adaptatives au patient par le biais de la gestion du stress. Elle tient compte des rapports complexes qui existent entre les facteurs psychosociaux et la physiologie humaine, En considérant la personne dans sa globalité, elle trouve tout son sens et son intérêt dans de nombreuses affections où l’intrication facteurs somatiques et psychologiques est particulièrement importante et complexe. Cette médecine s’inscrit dans une conception véritablement bio-psycho-sociale, modèle largement admis dans la psychiatrie contemporaine et qui s’oppose aux conceptions dualistes et dichotomiques.

Déroulement de la prise en charge

Informer l’ensemble des médecins généralistes et des autres partenaires médicaux de l’ouverture de ce Centre d’expertise.

Établir des collaborations interdisciplinaires et inter-établissements.

  1. Consultation infirmière et médicale : recueil le plus précis possible des informations et des données concernant les troubles présentés, des bilans déjà effectués et les traitements actuels. Évaluation de l'état de santé actuel des patients pour notamment identifier les facteurs déclenchant, la survenue des symptômes et évaluer leur impact sur la qualité de vie.
  2. Consultation d’évaluation psychologique : plaintes, difficultés psychologiques, qualité de vie, difficultés socio-professionnelles, …
  3. Consultation neuropsychologique et/ou psychiatre pour recueil des troubles et bilan (questionnaires, échelles de dépression, anxiété, QoL, …) et diagnostics précis. Un ensemble de tests peut être proposé en fonction des difficultés présentées.
    - WAIS IV (Symbole, Mémoire des Chiffres, Matrice, Similitude, Balance, Cubes, Arithmétique) ; MEM IV (Mémoire Logique, Mémoire des Symbole) ;
    - RL-RI 16 ; Figure de Rey ; Test du Zoo ; D2 ; TMT ; Protocole des Praxies ;
    - Échelles de dépression et d’anxiété, de Qualité de vie, …
    - Évaluation du langage et des nombres (au besoin).
    - Évaluation des situations professionnelles
    - Établir la liste des professionnels concernés et un planning

  4. Prise en charge
    - Proposition d’un programme personnalisé de prise en charge et de soins en Réhabilitation psychosociale et dans une approche holistique et psychosomatique, assorti d'objectifs réalisables et d'un suivi discuté avec le patient.
    - Aide à la réinsertion dans un travail de soutien et d’accompagnement

    Modalités
    - Groupe de parole/gestion des émotions et de la remédiation cognitive. Dans un second temps, en fonction des difficultés rapportées, des ateliers plus spécifiques pourraient être envisagés (gestion et compréhension de la fatigue, travail sur l’estime de soi, groupe sur le travail et l’emploi…).
    - Psychothérapie individuelle
    - Mindfulness
    - Quigong
    - Relaxation, Yoga, thérapie d’expression corporelle, …
    - Alternative au traitement médicamenteux dans la dépression, la Deep-TMS (Stimulation Magnétique Trancranienne répétitive). A Berlin, la Deep TMS serait utilisée avec succès et à grande échelle dans le traitement des COVID longs.

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